- La Belgique n'échappe pas aux mesures d'austérité imposées partout en Europe. Face à ces attaques, resurgissent les questions de la contre-offensive sociale mais surtout de l'unité à gauche. C'est à sujet que nous avons rencontré Nico Cué, secrétaire général des Métallos Wallonie-Bruxelles (FGTB).
Propos recueillis par Sébastien Brulez
Après la grève de fin janvier et les
négociations qui l'ont suivie, certains estiment qu'on a fait que modifier
quelques virgules mais qu'on ne peut pas vraiment parler de victoire.
D'abord il y a cette expression: « On a évité
le pire ». Mais le pire est toujours présent puisqu'il y aura encore un
contrôle budgétaire en juin, et que la situation économique n'arrête pas de se
dégrader. Ensuite il y a le budget 2013, n'oublions pas qu'il y a un engagement
avec l'Europe et qu'ils devront encore aller chercher 10 à 12 milliards
d'euros.
Le danger c'est que les politiques d'austérité
s'installent dans nos esprits et qu'au bout d'un an ou deux on considère
qu'elles sont normales. Il faut continuer à contester radicalement et rappeler
que les mesures qui sont prises aujourd'hui, même si on les a améliorées, sont
indécentes.
Il faut que l'organisation syndicale ait un plan de riposte qui s'inscrive dans la durée
et qui permette de réagir à la hauteur des offensives du gouvernement Di Rupo.
Qu'est-ce qui pourrait déclencher un tel
mouvement?
Il y a plein d'éléments qui sont encore dans
les cartons du gouvernement et qui risquent de déclencher une forte
mobilisation. Il faut donc rester vigilants. Dès qu'on sent qu'il y a une
mesure ou l'autre, il faut sortir le plan d'action avec l'ensemble de la FGTB
(et en front commun si possible) pour résister.
Quelle est votre position aujourd'hui par
rapport au Parti socialiste, le considérez-vous encore comme un relais pour les
travailleurs?
Le PS est au pouvoir, et en tant que
syndicalistes quand on a un problème avec les entreprises on doit aller
discuter avec le pouvoir qui est en place. Mais on a l'impression qu'ils sont
de plus en plus sourds à nos sollicitations. En plus de cela (et ils doivent
être clairs là-dessus), on ne peut pas continuer sur les politiques d'austérité
telles qu'elles sont, parce qu'il n'y aura pas de différence entre socialistes
et libéraux.
Si la majorité des travailleurs en Wallonie
ont voté pour un parti socialiste, et en sanctionnant le MR plus
particulièrement, on se retrouve aujourd'hui avec un gouvernement qui a un
programme MR au carré. C'est une trahison par rapport à l'ensemble des
travailleurs qui ont encore voté socialiste aux dernières élections. C'est
inacceptable et je trouve qu'il est normal de leur dire que c'est inacceptable.
Que vont-ils faire? Appliquer la règle d'or et
donc changer carrément de régime et donner tout le pouvoir à la finance? Ou
bien vont-ils réagir? Ce sera un débat qu'ils auront en tant que socialistes.
Mais nous, en tant que syndicalistes, on doit leur dire ce qui n'est pas
correct et nous continuerons à leur dire systématiquement. Le PS doit être en
rupture avec tout ça.
Nico Cué - congrès MWB |
Pensez-vous que le monde du travail peut
encore attendre une quelconque rupture de la social-démocratie? Est-ce qu'il ne
doit prendre en main lui-même l'alternative?
En tout cas, d'un côté on doit continuer à
dénoncer. Et en même temps, s'il n'y a pas d'écoute, je pense qu'il faudra à un
moment donné s'attendre à ce que le monde du travail se détourne. Le problème
pour nous c'est d'avoir une alternative suffisamment rapide pour qu'il ne se
détourne pas vers l'extrême droite, parce que c'est là que se trouve le danger.
Tout le danger c'est la non crédibilité, le fait d'avoir sali le mot
« socialiste ». On doit être extrêmement attentifs. Et à un moment
donné, s'ils continuent sur le même chemin, peut-être nous aussi voir comment
on s'interroge sur une alternative autre que le Parti socialiste.
Y a-t-il déjà des gens qui y réfléchissent
dans le secteur des métallos? Ou qui réfléchissent à un plan alternatif par
lequel le syndicalisme pourrait lui-même avancer?
Du point de vue industriel on a déjà commencé
à réfléchir, au niveau européen, à un plan de relance. Il y a des débats et des
discussions qui se mènent là-dessus.
Au niveau politique, dans les années 90 nous
étions à l'initiative de la création de « Gauches Unies », après le Plan
global. Nous avons donc déjà eu une expérience comme celle-là, une expérience
qui pour nous n'a pas été positive parce qu'elle portait beaucoup de lourdeurs
à l'époque. Aujourd'hui on est dans une situation économique, sociale et
politique qui est totalement différente du Plan global. On est dans une
transformation de régime et le PS doit le savoir: ou il devient le laquais de
la grande finance ou il reste avec nous. Dans le premier cas on devra se passer
de lui. Et au niveau des métallos, oui, il y a toute une série de réflexions
qui se font en termes de vision pour le futur.
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