Par Farid Khalmat
Des orages violents, des inondations et le début d’été pourri, que pouvait rêver de mieux le premier Di Rupo ? Les gens seront ainsi moins enclins à se préoccuper des mauvais coups qui se préparent au gouvernement. Au menu un trio spécialement mijoté par nos chefs : le dossier du statut ouvrier/employé, le blocage salarial, et de nouvelles coupes budgétaires, avec en toile de fond une dérive autoritaire, anti-démocratique dont le TSCG est la clef de voute.
Dossier
ouvrier-employé : je te tiens, tu me tiens par la barbichette
Dans ce dossier, politiques, responsables patronaux et
syndicaux semblent d’accord sur un point : il faut « trouver une
solution rapidement sinon… » Sinon quoi ? Sinon dès le 9
juillet un travailleur qui viendrait à être licencié par son employeur (par les
temps qui courent il n’est pas sûr qu’il le veuille vraiment) serait en droit
de réclamer un préavis équitable ! Notons donc au passage que ce que cherchent désespérément les
« interlocuteurs sociaux » serait un compromis en-dessous de ce
droit…
Aujourd’hui en Belgique 70% des travailleurs ont droit,
en cas de licenciement, à des préavis équivalents à ceux des
« employés », ceci grâce à des Conventions Collectives qui ont déjà
réduit, grâce au combat syndical, les discriminations que subissaient les
ouvriers. Toute harmonisation vers le bas serait donc un recul pour la grande
majorité des travailleurs et donc une victoire pour les employeurs qui
pourraient ainsi avoir les mains libres pour « dégraisser » plus
facilement. Et il n’est pas certain que les quelques petites miettes accordées
aux 30% qui ont aujourd’hui une moins bonne protection contre le licenciement
tiendraient longtemps face à l’offensive patronale généralisée.
Il faut bien constater que les directions syndicales
n’ont pas mis toute la pression nécessaire pour faire comprendre cet enjeu et
surtout pour mobiliser en conséquence. Elles se sont laissées trainer jusqu’à
la veille des vacances et la date fatidique du 8 juillet. De plus elles sont
entrées dans le jeu du gouvernement en se renvoyant la « patate »
chaude à tour de rôle. Le dossier qui était sur la table du gouvernement leur a
été renvoyé et est actuellement traité par les interlocuteurs sociaux qui
doivent répondre à 12 questions contenues dans la demande du gouvernement. Bien
évidemment les patrons bloquent ces négociations.
Au cours d’une réunion récente de son bureau, la FGTB est
amenée à constater « nous devons
rapidement communiquer, sensibiliser et mobiliser sur ce dossier. A ce propos,
le Bureau FGTB du 25 juin 2013 fera le point et tirera les conclusions. En
d’autres termes, en cas d’échec de la négociation, il faut poursuivre notre
pression sur le monde patronal, lequel exerce aussi son lobby et est derrière les
idées imbuvables sur le dossier employé-ouvrier ».
On pourrait
s’attendre à ce que « communiquer, sensibiliser et mobiliser »
conduise à « passer à l’action » mais non ! La conclusion serait
plutôt comme les patrons, « d’exercer un lobby ». Sur qui ?
Du côté des directions syndicales ont n’a pas trop envie,
à un an des élections, de fragiliser un peu plus « les relais ». Les « relais » fonctionnent très
bien mais dans l’autre sens : le PS met la pression pour éviter de devoir
prendre lui-même des mesures impopulaires. Il a besoin d’un paravent. Il fait
appel « au sens des responsabilités » des syndicats et prépare déjà
son explication habituelle : « on se bat comme de beaux diables mais
on n’est pas seuls au gouvernement, nous serions obligés d’accepter
un compromis avec la droite du gouvernement ». Bref ce qui est demandé aux syndicats c’est de définir eux-mêmes les
reculs qu’ils sont prêts à accepter !
C’est donc un
vrai parcours d’équilibriste auquel se
livrent les directions syndicales et le gouvernement.
Renouer avec le combat
Il est clair que
la stratégie actuelle des directions syndicales conduit les travailleurs à une
nouvelle impasse.
Même si les
vacances approchent il faut tout faire pour bloquer le détricotage des droits
sociaux. Dans le dossier du statut ouvrier-employé, il faut refuser de se
laisser entraîner dans des replis corporatistes et des querelles stériles entre
centrales et entre syndicats. Il faut remettre la solidarité à l’ordre du jour.
Contrairement à ce que peuvent laisser penser certains, un compromis sur ce
dossier ne freinera pas de nouvelles exigences patronales, en particulier dans
l’autre dossier brûlant : le blocage (en fait la diminution) des salaires.
Farid Khalmat - 21 juin 2013
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