Ce jeudi 14 juin, le SETCa de Charleroi a offert une tribune
aux partis « de gauche » devant son Comité Exécutif. C’est évidemment
dans le cadre de la dynamique lancée par la FGTB Charleroi le 1er
mai autour de la constitution d’une force politique à gauche du PS et d’Ecolo
que cette initiative se situe. Devant quelques dizaines de militants, le
Secrétaire Général du SETCa, Rudy Pirquet, plante d’emblée de débat dans un
cadre clair : les partis de gauche doivent-ils se retrouver dans un
gouvernement pour appliquer des mesures de droite ? Sont-ils encore de
gauche ?
En obtenant la parole en première, Ozlem Ozen,
vice-présidente de la Fédération PS de Charleroi et députée fédérale, n’avait
pas vraiment un cadeau. Il fallait un certain courage pour oser dire que
« le PS se bat pour faire barrage au maximum aux politiques
libérales »… et d’ajouter que c’est grâce au PS qu’on n’a pas de nouveaux
impôts et qu’on a gardé l’index ! Elle reprend alors tout les arguments
(« le moindre mal », « sans nous, ce serait pire, regardez
la Grèce et la Roumanie », « on a augmenté le salaire minimum,
ailleurs il baisse », « on n’a pas limité le chômage dans le
temps ») que le Secrétaire de la FGTB avait démonté lors de son discours
de 1er Mai.
Benjamin Dusaussois pour le PSL et Bernard Wesphael (MG en
constitution) repartent du cadre européen, niveau auquel de nombreuses
politiques d’austérité sont élaborées. B Wesphael, rappelle qu’il fut seul en
2005 à voter contre le traité constitutionnel européen, au niveau Wallon. Il
rappelle qu’à l’époque la Confédération Européenne des Syndicats était pour…
Au nom de la LCR, Freddy Mathieu a rappelé la « lettre
ouverte aux syndicalistes » qui circule dans les milieux syndicaux depuis
la mi-janvier : partant du constat que la social-démocratie (rose ou
verte) est totalement convertie « au marché » il décrit comment le
mouvement syndical a été conduit dans une impasse. Les « relais
politiques » et la « courroie de transmission » fonctionnent à
contresens, pour faire passer les mesures antisociales auprès des travailleurs.
Il prend à contrepied les arguments de la représentante du PS en décrivant
comment trente années du PS au pouvoir ont abouti au détricotage de la Sécurité
Sociale (notamment en matière de chômage et de pensions) et à la « note Di
Rupo » de juillet 2011, un copié/collé du fameux « modèle
allemand » qui brade les conditions de travail et la protection sociale.
Si le syndicat veut sortir de cette ornière, dit-il, il doit prendre des
initiatives, en toute indépendance. Cela changerait la donne à gauche.
Germain Mugemangango (du PTB) a acté plusieurs points de
convergence avec les trois intervenants qui le précédaient. Il a marqué son
intérêt pours les déclarations de Daniel Piron le 1er mai, mais il
pense que les organisations de la gauche radicale doivent prendre des
initiatives diverses (notamment lors de scrutins comme les élections
communales) pour se rapprocher et offrir la réponse unitaire attendue par le
syndicat.
Isabelle Meerhaeghe (Ecolo) a critiqué vertement le PS mais
n’a pas pu démarquer la politique gouvernementale d’Ecolo aux gouvernements,
wallon et communautaire, de « la bonne gouvernance » qui est un des
thèmes chers aux milieux pro-austérité européens. Elle s’est empêtrée dans une
pseudo explication du vote des écologistes en soutien au MES (« le
mécanisme pas le traité »)… Ce qui lui valut une réplique vive de Freddy
Mathieu et Bernard Wesphael à propos des conséquences automatiques,
inéluctables d’une acceptation parlementaire de ces nouveaux mécanismes
européens. « Des gouverneurs intouchables, incontrôlables, décideront du
montant que les pays devront débourser pour aider d’autres pays à aider leurs
banques comme en Espagne, sans débat, sans décisions démocratiques et puis on
nous redira encore que c’est l’Europe qui décide au-dessus » s’emporte
Freddy Mathieu d’accord avec B. Wesphael pour dire que le mouvement syndical
doit bloquer ce dossier par une mobilisation urgente et vigoureuse.
Plusieurs militants de l’Exécutif du SETCa sont intervenus
notamment à propos de la coupure qui s’approfondit entre le PS et les
travailleurs, à propos de l’index, de la pauvreté galopante, particulièrement
dans la région de Charleroi.
Dans la deuxième partie du débat, la question centrale était
de définir les possibilités de « création d’un nouvelle force politique à
gauche du PS et d’Ecolo » ainsi que l’exprimait la FGTB le 1er
mai. Rudy Piquet rappelle que Paul Magnette trouve cette proposition
« folklorique »…
C’est Freddy Mathieu qui ouvrait le feu sur cette question. « Pour
la LCR dit-il, petite organisation on ne vient pas vendre nos salades, on pense
que c’est au mouvement syndical de donner le tempo et le contenu d’un telle
dynamique, il en a la représentativité (3 millions de syndiqués) ; la
compétence, l’expertise (il défend au quotidien les travailleurs avec ou sans
emploi et connait leurs situations concrètes) ; les forces militantes (des
milliers de délégués dévoués, élus par les travailleurs). » L’addition des
petites forces des petites organisations de la gauche radicale est souhaitable
mais pas suffisante, estime t’il, on a besoin d’une autre alchimie pour
(re)construire une vrai parti de classe qui s’appuie avant tout sur la lutte
des travailleurs. Appuyant les interventions dans la salle, il continue « C’est
totalement réducteur de dire que c’est le PS qui a sauvé l’index ; la
droite et les milieux patronaux ont peur d’attaquer de front sur cette question
à cause de la force de mobilisation syndicale qui reste, malgré les coups,
relativement intacte, nous ne pouvons compter que sur nos forces».
Bernard Wespahael estime qu’avec la création du MG il n’y a
rien à créer en plus, se défendant de diviser la gauche, comme certains le lui
ont reproché personnellement. Le PSL s’est dit d’accord avec la notion de
« parti de classe » plaidant pour un vrai débat entre les différents
courants de la gauche radicale qui devraient y coexister. Le PTB et Ecolo sont
restés assez évasifs sur cette question. Ecolo en particulier se limitant à
reparler des « convergences à gauche », projet sans lendemains du PS
pour phagocyter Ecolo, auxquelles le parti
vert préfère une « gauche réunie, pluraliste », comment ? avec
qui ?
Ce débat a mis en évidence la recherche d’alternatives chez
les militants syndicaux, mais aussi l’immense travail de conviction qui doit
être fait avec les bases syndicales que l’offensive idéologique de la droite,
soutenue et répercutée par la pseudo-gauche, a labouré pendant des décennies.
Correspondant
14 juin 2012
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